Introduction

Les MMORPGs, ces mondes persistants qui n’existent qu’à travers les interactions de leurs joueurs et les infrastructures techniques qui les soutiennent, posent une question essentielle à l’archiviste : comment préserver ce qui est par essence mouvant, social, et contextuel ?

J'ai mené ces recherches sur l'archivage des MMORPGs pendant ma première année de Master Archives à l'Ecole nationale des Chartes en 2024. Mon mémoire est disponible sur HAL en libre accès : https://hal.science/hal-04895960.

Étude de cas : New World

Prenons New World, ce jeu, comme tant d’autres dans sa catégorie, n’est pas seulement un programme informatique ou une suite de règles. Il est aussi, et peut-être surtout, un théâtre d’interactions humaines, un terrain de sociabilités, et un espace où se redéfinit continuellement la notion même de jouabilité. Dans ce type de jeu, la jouabilité est une co-création : entre développeurs qui mettent en place des mécaniques, et joueurs qui, en expérimentant, transforment ces mécaniques en expériences sociales et culturelles. La notion de "métagaming", par exemple, illustre parfaitement ce phénomène où les joueurs, par leur inventivité, transcendent les règles établies pour imposer leurs propres normes stratégiques.

Défis d'archivage

Archiver un MMORPG, c’est donc tenter de saisir l’insaisissable : ces dynamiques de groupe qui se forment et se déforment, ces guildes qui fédèrent des centaines de joueurs autour d’un objectif commun, ces batailles épiques qui mobilisent des stratégies soigneusement élaborées, mais qui disparaissent aussi vite qu’elles sont apparues. Dans New World, comme dans bien d’autres jeux, la richesse de l’expérience réside dans ces instants partagés, souvent éphémères, que la documentation classique ne parvient pas toujours à capturer.

Mais ce n’est pas seulement l’interaction sociale qui pose problème à archiver. L’environnement même du jeu, ses cartes, ses monstres, ses événements réguliers et ses mises à jour, est en perpétuelle transformation. Les serveurs se vident, les extensions remplacent des pans entiers de contenu, et ce qui faisait hier la spécificité d’un monde virtuel devient aujourd’hui une trace à peine perceptible. Les outils numériques, comme les bases de données communautaires ou les enregistrements audiovisuels, offrent des pistes pour documenter ces univers, mais ils révèlent aussi leurs limites : comment conserver l’essence d’un monde qui ne cesse de se redéfinir ?

Conclusion

Ce mémoire explore les défis méthodologiques et éthiques de l'archivage des MMORPGs, et invite à réfléchir au rôle des institutions et des communautés dans la sauvegarde de ces univers.